Retour à l’aire protégée d’Ankarana (Nord de Madagascar, Région DIANA,) gérée par Madagascar National Parks, pour un suivi des activités réalisées dans le cadre du Fonds d’Intervention Spéciale en Septembre 2022. A partir des financements de la FAPBM, une mission de brigade mixte spéciale y a été dépêchée pour mettre fin à l’exploitation d’une carrière illégale de saphir et aux coupes illicites de bois perpétrées à proximité des noyaux durs.
Si les carrières souterraines de saphir menacent les grottes d’Ankarana, la déforestation menace les services écosystémiques. Pourtant, le massif d’Ankarana est un maillon essentiel de l’écotourisme de la région DIANA.
Quand une mission de brigade mixte met le feu aux poudres
Mobilisées en cas de pressions exceptionnelles, les missions de brigade mixte spéciale sous l’égide du Ministère de l’Environnement et du Développement Durable réunissent des membres de l’Organe mixte de contrôle (OMC), des gendarmes, des forces de l’ordre, des officiers de police judiciaire, des départements ministériels concernés, des agents du parc, des autorités locales et des représentants de comités locaux du parc (CLP). Généralement, les missions de Brigade Mixte Spéciale sont dédiées à sécuriser de manière continue un périmètre de pression. Ainsi, les agents sont amenés à marcher au moins 3 heures par jour et camper dans le parc.
Adjmal Mantsoor, agent de parc chez Madagascar National Parks depuis Septembre 2021, nous raconte sa première mission de Brigade Mixte Spéciale. « L’objectif de la mission était d’appréhender les exploitants illicites de saphir. Le 14 novembre 2022, nous avons décidé de les prendre par surprise. Nous sommes arrivés à l’aube. Nous avons arrêté 14 personnes et saisi un groupe électrogène qui servait pour le forage. Nous avons conclu la mission avec un inventaire des biens saisis. Le cas de l’arrestation des 14 personnes est assez exceptionnel puisque généralement des informations fuitent sur le planning et les parcours des missions et les délinquants arrivent à quitter les lieux avant l’arrivée des patrouilleurs ».
L’arrestation de ces 14 personnes a conduit les populations environnantes d’Ambodrofeno à ériger un barrage sur la RN6 le même jour. Les agents du parc ont été menacés. Les autorités ont par la suite suspendu toute incursion militaire dans l’aire protégée pour apaiser les tensions. La mission de Brigade Mixte Spéciale a dû être stoppée au bout de 5 jours.
Une task force régionale pour des solutions durables
Devant les manifestations publiques, une mission de restitution des 14 prisonniers a été menée dans le village d’Ambodrofeno au bout d’une semaine. Les autorités militaires en ont profité pour rappeler les limites du parc (zone tampon et noyau dur) et sensibiliser sur les interdits aux niveaux des noyaux durs. Quelques jours plus tard, les membres de l’OMC ont sollicité le soutien du Ministre de l’Élevage et de l’Agriculture en mission dans la région. Il a réitéré les règles concernant l’interdiction formelle d’exploitation dans le noyau dur et les limites du parc. Il a encouragé les communautés à délaisser l’exploitation et à se tourner vers l’agriculture, en proposant les semences.
Une réunion extraordinaire de l’OMC élargie avec le Gouvernorat du parc a décidé de porter l’affaire au niveau régional. Une task force régionale, opérationnelle au premier trimestre 2023, aura la lourde tâche de réfléchir sur les solutions durables face à l’exploitation illégale de saphir dans l’aire protégée, et à la meilleure manière d’affecter les moyens à disposition.
« En attendant les solutions durables, nous poursuivons les patrouilles dans le parc en évitant les carrières de saphir, pour préserver la sécurité des agents. Par contre, nous poursuivons les contrôles au niveau des zones de coupes illicites. Nous avons d’ailleurs pu intercepter 40 troncs coupés récemment. » conclu Amidou Djaovita, directeur du parc d’Ankarana.